Gastronomie,  Japon

Les douceurs sucrées d’Usagiya.

Crédit photo: Amélie Manchoulas

Connaissez-vous les wagashis? Ce sont de merveilleuses pâtisseries , si délicates que l’on hésiterait presque à les manger! Elles accompagnent la cérémonie du thé, et leur confection ne peut se faire qu’au prix d’un apprentissage long et rigoureux. Charlotte Caspar fait partie des rares occidentaux qui ont pu apprendre au Japon l’art traditionnel des wagashis. Revenue en France après cette riche expérience, elle ouvrira bientôt une boutique à Strasbourg, pour la plus grande joie des gourmets alsaciens! Asiascope a rencontré cette jeune femme passionnée lors de la dernière édition de Japan Expo, et vous propose de découvrir le parcours atypique d’une pâtissière portée par son art.

Charlotte Caspar, pâtissière et fondatrice d’Usagiya
Crédit photo: Auriane Perez

En Juillet 2022, Charlotte Caspar présentait sur une des scènes de Japan Expo devant un public conquis la recette des dorayakis. Récemment revenue d’un long séjour au Japon au cours duquel elle a appris la technique de fabrications des wagashis, son but est de faire découvrir aux palais français la riche histoire de ces pâtisseries qui rythment la vie des japonais. En effet, selon Charlotte: ” La pâtisserie suit les japonais de leur naissance à leur mort. Au fil de l’année, leur texture et leur goût change. Certaines confections apparaissent uniquement pour le Hanami ( la période d’éclosion des fleurs de cerisiers) , le Jour des Enfants ou le Nouvel An.” Les wagashis s’inspirent de la couleur des kimonos ou des fleurs de cerisiers. C’est au cours de long séjour au Japon que Charlotte a pu appréhender l’importance des wagashis dans la culture japonaise.

Un parcours unique

La passion de Charlotte Caspar pour les pâtisseries japonaises commence en 2008.

“J’ai découvert les wagashis lorsque j’avais 18 ans, lors de la Japan Week, un événement alsacien . J’ai vu cette table avec 3 wagashis et j’ai trouvé cela très beau. Je me suis dit ensuite qu’il fallait à tout prix que j’apprenne à en faire!. Mais à 18 ans, partir au Japon c’était un véritable défi. Il y avait toutes sortes d’obstacles financiers, linguistiques…J’ai donc d’abord fait une formation en hôtellerie/ restauration au CEFPPA d’Illkirch. J’ai ensuite fait une licence professionnelle Arts de la table à Angers, pour laquelle il faut valider un stage. Alors que je n’arrivais pas à en trouver, l’école japonaise de pâtisserie qui était venue lors de la Japan Week a fait une démonstration en Alsace. J’ai pu les contacter et j’ai eu leur soutien pour toutes les démarches administratives concernant mon départ.”

C’est donc avec 2 valises et des étoiles plein les yeux que Charlotte arrive au Japon à l’âge de 20 ans, en 2009 . “J’ai travaillé pendant 6 mois dans un petit wagashiya ( *NDR: boutique de wagashis) où j’ai pu découvrir le métier. J’ai découvert un monde fabuleux et j’ai tout de suite su que j’allais y faire ma carrière. J’ai eu beaucoup de chance car j’ai pu toucher à des pâtisseries auxquelles normalement un débutant n’a pas accès. ” A l’issue de son stage, la jeune femme se voit offrir un poste dans la boutique, alors qu’elle doit rentrer en France pour sa soutenance. Elle revient dans l’archipel au bout de 2 semaines , armée d’un visa vacances -travail. Mais pour autant, Charlotte n’a pas oublié la fameuse école de pâtisserie de Tokyo. Pour rentrer dans cet institut , il lui était nécessaire d’apprendre le japonais dans une école de langue,et c’est ce qu’elle fera pendant 9 mois: ” je n’ai pas beaucoup dormi pendant cette période!” s’amuse t’elle. C’est au bout de 3 ans qu’elle intègre l’école, tout en travaillant dans une nouvelle boutique au cœur de la gare de Tokyo: ” Cette école a des liens avec Toraya, la pâtisserie officielle de l’empereur. Lorsque son président a appris qu’une française apprenait l’art des wagashis, il a insisté pour me recruter. “Charlotte débute donc à la boutique de l’enseigne à Akasaka Mitsuke, un quartier de Tokyo où se trouve la résidence impériale.

La boutique Toraya à Akasaka
Crédit photo: Toraya.co.jp

“Toraya a 700 ans d’histoire. Travailler pour eux a représenté une expérience extraordinaire.” affirme la jeune femme. Évidemment, le fossé culturel a marqué cette période professionnelle: ” Les tensions sont inévitables, car nos cultures sont aux antipodes l’une de l’autre. J’ai beaucoup aimé travailler chez Toraya, mais le cadre était très strict. “

Au bout de 2 ans, Charlotte a envie de quitter Tokyo pour un cadre plus rural. Elle s’installe alors à Yokkaichi, ville portuaire située dans la préfecture de Mie et à 45 minutes de Nagoya. Elle y reste jusqu’à la fin de son visa. C’est sans regret qu’elle retourne en France, riche d’une expérience de 10 ans.

Usagiya, une nouvelle aventure en Alsace.


Dorayakis fourrés à l’anko
Crédit photo: Amélie Manchoulas

Charlotte revient donc en 2019, avec en germe une idée de boutique ou de cours de pâtisserie afin de partager et transmettre son savoir. Mais après 10 ans à l’étranger , il faut partir de zéro. Les 2 années de crise sanitaire dues au COVID lui permettent de consacrer son temps à construire son projet. En 2021, le concept d’Usagiya naît. “Il y a beaucoup d’événements liés au Japon en Alsace. Pas mal d’entreprises japonaises sont installées dans la région. J’avais envie d’un boutique vente à emporter, et de participer ponctuellement à ces manifestations culturelles. Cette activité de vente ponctuelle a tout de suite rencontré un vif succès. Je voulais vraiment m’installer à Strasbourg car c’est une ville que j’aime beaucoup, j’y suis très attachée. A la recherche d’un local dans la ville, j’ai rencontré Sylvie Taroux, avec qui je suis à présent associée. “Ensemble, elles font un premier salon, Japan Addict, où le public fait un très bon accueil aux pâtisseries de Charlotte. Elle propose aussi régulièrement ses douceurs à la librairie Le Temple d’Inari à Mulhouse. Elle s’est constituée au fil du temps une clientèle fidèle qui la suit même jusqu’à Paris pour Japan Expo!

Suhamas, gâteau végétal
Crédit photo: Amélie Manchoulas

Pour confectionner ces douceurs japonaises, Charlotte parvient à trouver la plupart des ingrédients en France : “Il faut de l’eau , des haricots azuki, du riz mochi et de l’agar-agar. A part le riz, tout vient d’ici. ” Les produits sont bio- éthiques et choisi pour leur bienfaits, comme le sucre de canne, meilleur pour la santé que le sucre de betterave. La carte d’Usagiya comporte toujours un daifuku, un dorayaki,un yokan et une pâtisserie de saison. Les fruits locaux y trouvent leur place comme les mirabelles et les quetsches. A l’image de la tradition japonaise, les wagashis sont saisonniers.

Prochaine étape pour Usagiya: l’ouverture de la boutique. Celle-ci devrait avoir lieu en octobre, les travaux sont en cours. Charlotte a hâte de pouvoir transmettre cette tradition séculaire et toucher un nombre grandissant de personnes qui sauront apprécier la délicatesse de ces confections. Une chose est sûre: sa passion et son enthousiasme communicatifs nous donnent envie de lui souhaiter le meilleur pour cette belle aventure, et les alsaciens ont de la chance de bientôt pouvoir profiter d’un petit bout de Japon en plein Strasbourg!

Merci à Charlotte Caspar pour sa disponibilité, et à Japan Expo pour avoir rendu cette interview possible.

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