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“Porcelain Nude” Entretien avec Yasumichi Morita

Pour la 3ème année consécutive se tient à Paris une exposition des photographies de l’artiste Yasumichi Morita. Intitulée “Porcelain Nude”, cette série de clichés en noir et blanc met en scène des corps féminins, à la fois figés et dynamiques en angles inédits. Les ombres et lumières donnent à voir des fragments de silhouettes dont le grain de peau évoquent la porcelaine, créant ainsi un matériau sensuel. M Morita a accordé à Asiascope un entretien exceptionnel.

Asiascope: L’exposition “Porcelain Nude” se tient tous les ans à Paris depuis 2015.Quels sont les liens qui vous unissent à la capitale?

Yasumichi Morita: En fait, ce qui m’a amené à choisir Paris la première fois, c’est le constat que les français semblent très familiers avec l’art de manière générale, comparé au Japon. Les plus grandes expositions photographiques se tiennent d’ailleurs ici. Avant  Paris, je n’avais jamais exposé mes photos dans mon pays.

La capitale française est à la fois intransigeante et généreuse. De ce fait,c’est donc un endroit très important pour les artistes du monde entier. Au Japon, je suis connu et catégorisé en tant qu’architecte d’intérieur, ce qui m’empêche un peu d’exister là-bas en tant qu’artiste photographe. Paris m’apporte une plus grande liberté artistique.

A: Pouvez-vous nous parler de l’inspiration derrière votre exposition?

YM: Dans mon métier de designer d’intérieur, je suis très souvent à la recherche de clichés pour décorer les espaces que j’aménage. Cependant pour moi, ils doivent être comme des sculptures monochromes à la fois abstraites et précises. Devant l’impossibilité de trouver des photos répondant à ces critères, je me suis décidé à les prendre moi-même.

Je ne recherche pas l’érotisme. Pour moi, il n’existe que des lignes droites ou courbes, et qui dit courbes dit corps féminin. C’est pour moi le comble de la beauté. Pour cent femmes, il y aura cent courbes différentes, et c’est cet infini de possibles qui m’attire le plus.

En outre, je vois des similitudes entre le corps et la céramique. Lorsque l’on voit un bel objet, une tasse, une coupe… on a envie de le toucher et ce contact éveille des sensations. Par cette vision de texture, mes photos provoquent les mêmes réactions. Certains m’ont dit avoir pensé aux dunes du désert en voyant mes clichés…Je suis ouvert à toutes les interprétations, et c’est ce qui fait la richesse de l’art abstrait,  cette pluralité de regards. Mon exposition donne le corps à voir sous des angles inédits, et cela surprend beaucoup.

A: Vous avez mentionné être d’abord connu en tant qu’architecte d’intérieur. Quel cheminement vous a amené à vous définir également en tant que photographe?

YM: J’ai toujours aimé prendre des photos.Je prenais beaucoup de paysages par exemple. Mais dans les années 90 qu’on peut définir comme les” années MTV”, la musique et la mode m’attiraient également. C’était l’époque de l’avènement de grands noms de photographes de mode. J’ai donc pensé à ce moment-là devenir moi-aussi photographe dans cet univers. En fin de compte, je n’ai pas choisi cette voie et j’ai commencé à travailler en tant que designer d’intérieur, mais la photographie est toujours restée une passion. Depuis des années, je me fixe comme objectif de montrer la beauté et de rechercher comment le faire le plus efficacement possible.

Si je devais établir un point commun entre le design intérieur et la photographie, je dirais que c’est le jeu de l’ombre et de la lumière. Je passe plus de temps à travailler l’éclairage que sur le matériel.Les gradations du noir au blanc sont primordiales.

A: Dans vos projets d’architecture d’intérieur (hôtels,bars,boutiques) quelle est la place accordée à l’artiste?

YM: C’est bien là le fossé qui sépare l’architecte de l’artiste.Dans le premier cas, il y a un client, et des concurrents. Vous vous devez d’être le plus original et attractif possible. Vous devez absolument vous démarquer. Ce qui va vous rendre différent, c’est la partie artistique, cette originalité, ce regard que vous seul possédez. Un designer peut garder le même style du début à la fin de sa carrière. En ce qui me concerne, sur un même projet, je peux avoir cent visions différentes, parce que tout change en permanence: le temps, l’atmosphère d’un quartier, les gens… Il est indispensable de se renouveler.

En outre, lorsque je reçois des projets,  je me base sur mon expérience personnelle de client.Il n’est pas toujours nécessaire de consacrer énormément d’argent pour obtenir un résultat satisfaisant.

Le restaurant Ozabu à Kyoto, l’un des nombreux projets de Yasumichi Morita.

 

A: Quels sont vos projets futurs en tant que photographe?

YM: Je vais continuer ma série “Porcelain Nude” car le corps féminin offre encore des possibilités infinies.En définitive, peu importe les thèmes choisis, le plus important c’est le concept d’élégance et de beauté. C’est cette quête qui est au cœur de mon œuvre.

A: Merci beaucoup!

Merci à l’artiste pour sa disponibilité, ainsi qu’à Jean-Sébastien Jeannin et Keiko Miyauchi d’Air de Malice pour sa traduction de l’entretien.

 

“Porcelain Nude” se tient jusqu’au 12 novembre 2017. Allez vite découvrir cette exposition sensuelle et délicate, et un artiste de talent.

Porcelain Nude

Galerie Corrazza

11-12 Galerie de Montpensier

75001 Paris

(Jardin du Palais Royal)

Entrée libre

Retrouvez Yasumichi Morita est ses projets de design intérieur sur son site Glamorous 

et ses œuvres d’artiste ICI

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